Chasse, profits et pertes : le chevreau et le chasseur

L'année s'achevait.
Année noire pour les viandards.

Lui. Il avait quitté la chaleur de la maison. Le jour levé, frais, les chemins creux et humides, emplis de feuilles mortes et la faute à Rousseau... La tête dans le ...

Mais avant d'en parler, laisse-moi présenter le décor.

Tu as entendu parler de l'effet papillon ?

"Un battement d'aile de papillon en Chine provoque une tempête en Europe".

Tu vois ! Tu es en terrain familier.

Cette phrase signifie simplement que, d'après la théorie du chaos et selon les propriétés des courbes fractales (objets mathématiques), un point initial et son voisin, quelle que soit l'échelle (locale, régionale ou continentale) produiront deux comportements très différents.

Donc, une infime variation du point de départ traduit un phénomène final extraordinairement différent.

A l'inverse, ceux et celles qui croient que l'esprit humain n'est pas seulement régi par la raison, que le réel n'est que l'envers d'une tapisserie, nous disent que ce que l'on appelle coincidences déconcertantes, interactions étranges, aptitudes surprenantes, ne sont en définitive que des manifestations d'une réalité non comprise parce que non souhaitée.

J'avais envie, aujourd'hui, de jouer avec ces curiosités que l'on appelle les escaliers temporels, ces hasards qui n'en sont pas.

Il n'y a pas malice. Ni naiveté. Encore moins de cynisme.
Sur ce, bon suaire.

Dimanche 30 décembre. Quessoy, lieu-dit la Terre-Rouge (Côte d'Armor).

A 11h30, un chasseur de 46 ans était pris d'un malaise au cours d'une partie de chasse. Il s'est effondré, la tête dans le ruisseau. Noyé.

A la même heure, exactement, à Ribemont (Aisne), un chevreau (le petit du chevreuil) cavalait comme un fou, effrayé par les tirs des tueurs de l'aube.

Il se jetta dans la flotte glacée du canal de la Sambre-A-L'Oise.

Coup de bol, à ce moment là, un couple se promenait sur la rive. Il appela immédiatement les pompiers; qui vinrent sans tarder.
Grosse galère : l'eau était gelée par endroit, les conditions difficiles.

Après de nombreux efforts, la petite bête fut extirpée du canal et prise en charge. Couverture de survie (photo) et tout le toutim.

Bambi (les gentils pompiers l'ont surnommé ainsi) reprit des forces et refusa de quitter ses sauveteurs. Les gars attendaient.
Le chevreau se décida enfin à déguerpir et en quittant les lieux, resta de longues minutes à regarder ses secoureurs.

Je trouve ça plaisant et chouette.

J'ai déniché cette histoire dans l'Union, la gazette des pays de la Marne et de l'Aisne.

Le début d'année commence avec une lumière douce et paisible.
L'homme a deux façons de vivre : grossièrement et subtilement.
Tout se paie, tout se compense.
Tout s'équilibre.

Comme le disait Michel Audiard, "Les conneries, c'est comme les impôts, on fini toujours par les payer".

Comments

[Kivabien]

Sympa.

C'est vrai que c'est celui du Monde que j'ai lu en premier, mais suite au problême avec les modos, j'ai mis celui là en favori, ayant peur de plus retrouver l'autre, aprés le passage de la faucheuse :)

[Hervé]

@Kivabien
Ouf ! Que c'est sympa ! :-))

Si tu préfères, dépose tes commentaires sur le blog hébergé par Le Monde (c'est le premier, l'original si on veut) car il y a vraiment du passage (500 /jour) et ça fera du monde pour visiter ton blog qui vaut le coup.

[Kivabien]

Pour moi, c'est le meilleur article que j'ai lu sur votre blog. Du "ça branle dans le manche" à son meilleur niveau.

Petite présentation de votre blog, sur celui que je viens de créer: http://kivabien.com/ca-branle-dans-le-manche-taomugaia

Encore merci pour les petites merveilles que sont vos articles.

[pascale]

c'est une magnifique histoire qui se tèrmine bien.