Corrida : il n’y a pas de mal à faire du mal du moment que le rosé est frais
Hola baigneur ! Faut serrer les dents... Tu ne vas pleurnicher comme une fillette non ?
Même si t'es sapé comme une poupée, t'es presque un homme !
Les toros que tu charcutes, ils font autant de cinéma ? Non !
C'est à Jorge Adame que je m'adresse, un novillero méxicain qui s'est fait poinçonné le 17 février dans l'arène de la Plaza de Toros San Marcos à Aguascalientes.
Il chouine, le pantin coloré; sa guibole gauche le fait atrocement souffrir; c'est dit-il, comme si une boule de feu le traversait de la plante du pied à la hanche.
Jorge Adame a donc grandement hypothéqué sa participation à la clôture de la temporada (saison ) d'hiver et c'est tant mieux.
Car notre attention se tourne dorénavant vers la saison tauromachique française (et espagnole) qui a débuté le 10 février à Samadet mais qui ne démarre véritablement qu'à Arles, lors de la feria de Pâques, du 21 au 24 mars.
Le sang va couler, les aficionados s'apprêtent à jouir, c'est reparti pour un tour.
Mais revenons sur Samadet, navrante commune des Landes qui se veut irréductible garnison sur le front tauromachique français, lieu d'où a été lancé un appel, en février 2007, qui affirme que la corrida "s'inscrit remarquablement dans une modernité dont la quête de sens s'accompagne malheureusement dans beaucoup d'autres domaines d'une perte de repères qui n'a pas cours dans nos arènes" et invite les députés du Parlement Européen à respecter ces aficionados qui, grâce à ce loisir sanglant, peuvent "communier ensemble autour d'une idée simple : l'homme triomphe du chaos en s'élevant au-dessus de sa condition".
C'est nul à se taper la tête contre un radiateur, hein ?
Cela étant, Samadet et ses édiles tiennent absolument à porter le flambeau de l'art de torturer sous le soleil au nom d'une tradition locale ininterrompue.
Cet alibi permet à une ville de perpétrer les pires saloperies du moment que la tradition en question n'a jamais cessé d'être célébrée, d'une façon ou d'une autre, mais généralement festive.
Samadet aurait, à ce titre, bien souhaité poursuivre la délicieuse fête séculaire de la lapidation des "moins que rien", qui permettait, une fois l'an, aux habitants de caillasser tous les enfants disgracieux (boiteux, voutés, malingres, roux, végétariens, non-croyants...) vivant dans la bourgade.
Mais des consciences se sont élevées et ont mis fin à cet évènement local, même si les responsables du comité des fêtes avaient proposé, à une courte majorité, de remplacer ces enfants bien français vecteurs d'émotion par des petits noirs, que l'on disait moins sensibles.
Nouvelle levée de boucliers des larves 'droitdelhommistes' malveillantes contre ces réjouissances.
Les habitants de Samadet ont alors suggéré d'utiliser des chiens errants, de les arroser d'essence et d'y mettre le feu à l'occasion de la Saint-Jean d'été afin d'honorer le retour du soleil.
Les associations de protection animale se sont évidemment opposées vigoureusement à cette tradition pittoresque, laissant Samadet dans la plus grande perplexité.
Et si on tuait des taureaux inoffensifs dans une arène, comme en Espagne, s'exclama un élu !
Ça reviendrait au même, non ? Le principal, c'est bien de faire la java, de manger des saucisses, de se piquer la ruche tout en faisant du mal aux bêtes !
"Ya pas de mal à faire du mal, ça fait du bien de faire du mal !"
C'est donc accrochés à cette devise comme des poux à des cheveux que les habitants de Samadet sont entrés dans le 21ème siècle, flonflons et calicots, rosé bien frais, très satisfaits.